Les conditions de validité de la transaction
L’article 2044 du Code civil définit la transaction comme suit :
« La transaction est un contrat par lequel les parties, par des concessions réciproques, terminent une contestation née, ou préviennent une contestation à naître.
Ce contrat doit être rédigé par écrit ».
Premièrement, la transaction est un contrat. Comme tout contrat, la transaction est soumise aux conditions générales de validité des contrats contenues dans l’article 1128 du Code civil.
Ainsi, la transaction doit être conclue avec le consentement libre et éclairé des parties, entre des parties qui ont la capacité de contracter et son contenu doit être licite et certain.
A défaut, la transaction est nulle.
Sur la capacité de transiger, l’article 2045 du Code civil dispose que, pour avoir la capacité de transiger, il faut avoir la capacité de disposer des objets compris dans la transaction.
Deuxièmement, la transaction doit faire l’objet d’un contrat écrit. Cependant, selon la Cour de cassation, l’exigence d’écrit n’est pas une condition de validité de la transaction, l’écrit n’est exigé que pour la preuve (Cass. soc., 29 février 1984, n°81-42.623 ; Cass. soc., 9 février 1996, n°93-42.254).
Le contenu de la transaction écrite doit être non-équivoque et il est conseillé, pour éviter toute contestation, de prévoir notamment les mentions suivantes :
- Le rappel des faits à l’origine du litige
- Les étapes de la rupture du contrat de travail
- L’existence du litige : sur ce point il convient d’être très vigilant en indiquant avec précision la nature et l’étendue du différend qui oppose les parties dans la mesure où l’article 2049 du Code civil dispose que « les transactions ne règlent que les différends qui s’y trouvent compris »
- Les prétentions respectives des parties
- Les concessions réciproques des parties
- La volonté des parties de mettre fin au litige
- Les informations sur le régime de la transaction
A noter que l’accord transactionnel doit être signé par l’employeur et par le salarié.
Troisièmement, il existe une condition de litige né ou à naître. Cela signifie qu’il doit exister, au moment de la conclusion de la transaction, un différend entre l’employeur et le salarié, ce différend pouvant porter tant sur l’exécution que sur la rupture du contrat de travail.
Chacune des parties doit se prévaloir de griefs à l’encontre de l’autre partie et il appartiendra au juge de vérifier l’existence d’un réel litige (Cass. soc., 22 juin 1997, n°75-40.679).
Le différend doit apparaître clairement et expressément dans le corps même de l’accord transactionnel au sein duquel il sera précisé les griefs de chacune des parties.
Classiquement, le salarié expose les éléments qu’il reproche à son employeur et qui peuvent porter sur l’exécution ou la rupture de son contrat de travail. En réponse, l’employeur conteste les éléments reprochés par le salarié et ajoute les griefs qu’il reproche à ce dernier.
Il s’agit donc d’un point non négligeable d’un point de vue psychologique : le salarié n’obtiendra pas de reconnaissance expresse des manquements de l’employeur par ce dernier dans le cadre d’une transaction.
Quatrièmement, chacune des parties, employeur et salarié, doit accepter de faire des concessions réciproques dans le but d’éteindre le litige né ou de prévenir du litige à naître.
La jurisprudence fixe des conditions de validité de ces concessions :
- Elles doivent être suffisantes : les concessions ne doivent pas être dérisoires sous peine d’invalider la transaction. En revanche, la jurisprudence n’exige pas que les concessions soient équivalentes.
- Elles doivent être effectives : la notion de concession implique qu’une partie renonce à une ou plusieurs choses. La concession doit donc être existante. A titre d’exemple, il a été jugé que la dispense de préavis n’était pas une concession quand l’employeur ne versait pas l’indemnité compensatrice de préavis (Cass. soc., 23 avril 1997, n°94-40.349).
A noter que ces conditions de validité s’apprécient au moment où la transaction est conclue (Cass. Soc. 27 mars 1996, n°92-40.448 ; Cass. soc., 15 nov. 2007, n° 06-42.305)
Classiquement, les concessions de l’employeur consistent en le versement d’une indemnité transactionnelle au profit du salarié.
De son côté, le salarié s’engage à n’intenter aucune action de quelque nature que ce soit contre son employeur et, le cas échéant, à se désister de l’action en cours s’il avait intenté une action avant de conclure la transaction.
Cinquièmement, il existe une exigence de temporalité : la transaction ne peut être conclue que postérieurement à la rupture définitive du contrat de travail (Cass. soc., 29 mai 1996, n°92-45.115 ; Cass. soc., 4 janvier 2000, n°97-41.591).
Selon une jurisprudence constante, la transaction conclue avant la notification de la rupture du contrat de travail est nulle (Cass. soc., 25 septembre 2013, n°12-21. 577 ; Cass. soc., 12 février 2020, n°18-19. 149).
Cela signifie que la transaction ne vaut pas rupture du contrat de travail et doit faire suite à un mode de rupture du contrat de travail tel qu’un licenciement, une démission, un départ à la retraite ou encore une rupture conventionnelle.
Un focus sur la distinction entre transaction et rupture conventionnelle est à faire dans la mesure où il existe souvent une confusion entre les deux dans l’esprit de certains salariés.
Une rupture conventionnelle n’est pas une transaction. C’est un mode de rupture du contrat de travail qui peut éventuellement être suivi d’une transaction.
Il est à noter par ailleurs que le fait d’engager une action prud’homale n’est pas rédhibitoire pour transiger.
Il est en effet tout à fait possible de conclure une transaction au cours d’une instance, après l’engagement d’une procédure.
Dans ce cas, si une transaction est signée, l’une des concessions du salarié est de se désister de l’instance en cours.