SYNTEC : nullité des conventions de forfait en heure

Par Arrêt 4 étoiles rendu par la Chambre Sociale de la Cour de Cassation le 4 novembre 2015 (Cass. Soc. 4 nov 2015 n° 14-25.745 à n° 14-25.751 FS-P + B + R + I – SA ALTRAN TECHNOLOGIES C/ Madame B) la Cour de Cassation encadre strictement la possibilité pour l’employeur de recourir à une convention de forfait en heures sur une base hebdomadaire prévue à l’article III chapitre II de l’accord du 22 juin 1999 lequel instaure une convention de forfait en heures sur une base hebdomadaire pour les salariés relevant des « modalités 2 – réalisation de missions ».

Ainsi, la Cour, de façon très didactique précise les conditions de validité d’une telle convention de forfait heures:
« Mais attendu d’abord, qu’aux termes de l’article 3 chapitre II de l’accord du 22 juin 1999 relatif à la durée du travail et annexé à la convention collective nationale Syntec, lequel instaure une convention de forfait en heures sur une base hebdomadaire pour les salariés relevant des modalités 2 réalisations de missions, lesdites modalités s’appliquent aux salariés non concernés par les modalités standard ou les réalisations de missions avec autonomie complète, et que tous les ingénieurs et cadres sont a priori concernés, à condition que leur rémunération soit au moins égale au plafond de la sécurité sociale ;
qu’il en résulte que seuls les ingénieurs et cadres dont la rémunération est au moins égale au plafond de la sécurité sociale relèvent des modalités 2 réalisations de mission ;
Attendu, ensuite, que lorsqu’un employeur est lié par les clauses d’une convention collective, ces clauses s’appliquent au contrat de travail, sauf stipulations plus favorables et que le salarié ne peut renoncer aux droits qu’il tient de la convention collective ;  »
1. Ces « modalités 2 – réalisation de missions » s’appliquent aux salariés non concernés par les modalités standard (35 heures) ou les salariés en forfait jour.
Cette première condition étant posée par la Cour de Cassation, la Chambre Sociale en vient à restreindre encore davantage la possibilité pour l’employeur de l’utilisation d’un tel forfait horaire hebdomadaire en posant une deuxième condition.
2. La Cour précise que, même si tous les ingénieurs et cadres sont a priori concernés, seuls les ingénieurs et cadres dont la rémunération est au moins égale au plafond de la sécurité sociale soit 38 040 euros par an pour 2015, relèvent des modalités 2 – réalisation de missions.
Ces deux conditions posées par la Cour étant cumulatives, il s’en suit que l’absence de l’une ou de l’autre desdites conditions rend nulle la convention de forfait hebdomadaire stipulée dans le contrat de travail du salarié.
Dès lors, et de façon fort claire, l’employeur ne peut dorénavant, conclure des conventions de forfait hebdomadaire avec des ingénieurs et cadres dont la rémunération est inférieure au plafond de la sécurité sociale à savoir pour 2015, 38 040 euros par an.
Pour l’année 2016, le plafond de la sécurité sociale prévu est de 38.616 euros par an.
A défaut, la convention individuelle de forfait horaire est nulle et de nul effet avec les conséquences afférentes.
Les salariés concernés par la nullité de leur convention individuelle de forfait horaire hebdomadaire peuvent dès lors, de façon légitime et bien fondée, solliciter condamnation de l’employeur devant le Conseil de Prud’hommes au paiement de toutes les heures supplémentaires effectuées au delà de 35 heures par semaine.
En outre, la Chambre Sociale de la Cour de Cassation va jusqu’à préciser que l’accord du salarié, ingénieur ou cadre, à cette convention de forfait horaire hebdomadaire par la signature de son contrat de travail notamment, ou d’un avenant prévoyant cette convention de forfait horaire hebdomadaire ne rend pas pour autant valide cette dernière.
La Chambre Sociale de la Cour de Cassation affirme précisément que, s’agissant des entreprises relevant de l’accord SYNTEC de 1999, l’employeur ne peut s’affranchir de la condition de rémunération minimale posée par ce texte en invoquant l’accord individuel du salarié donné à l’application d’une convention hebdomadaire de forfait.
En conséquence, peu importe le consentement du salarié à une rémunération forfaitaire horaire hebdomadaire, si la rémunération du salarié est inférieure au plafond de la sécurité sociale (38 040 euros par an) et que le salarié en l’occurrence relève des modalités 2 – réalisation de missions, ce salarié n’étant concerné ni par les modalités standard (35 heures) ni par le forfait jour, la clause de rémunération forfaitaire horaire hebdomadaire est nulle.
Le salarié peut dès lors se prévaloir du paiement de ses heures supplémentaires, voire en sus, d’une indemnité forfaitaire pour travail dissimulé de 6 mois de salaire s’il parvient à démontrer le caractère intentionnel de l’employeur ayant fait figurer cette clause dans le contrat afin de dissimuler les heures supplémentaires, devant le Conseil de Prud’hommes.

Référence de l’Arrêt : Cass.Soc 4 nov 2015 n° 14-25.745 à n° 14-25.751 FSP + B +R + I
Par Maître Sandrine PARIS
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